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Le langage peut il ĂȘtre une prison?

Le langage peut il ĂȘtre une prison? Sujets / La culture / Le langage /

Un début de problématisation ...

    Le langage peut-il ĂȘtre une prison ?
ProblĂšme :
Partons d'une Ă©vidence : le langage ne rend pas toujours toujours compte de notre pensĂ©es, ni des choses comme nous le voudrions. En ce sens, il serait une prison, il nous emprisonnerait dans le sens « fixĂ© » par les mots. Il ne nous permet pas toujours de rendre compte de nos Ă©tats d’ñme, de nos Ă©motions, de nos sentiments. On a d'un cĂŽtĂ© des signes, des symboles, de l'autre les « choses » dont on parle.
Texte :
« C'est dans les mots que nous pensons. Nous n'avons conscience de nos pensĂ©es dĂ©terminĂ©es et rĂ©elles que lorsque nous leur donnons la forme objective, que nous les diffĂ©rencions de notre intĂ©rioritĂ©, et, par suite, nous les marquons d'une forme externe, mais d'une forme qui contient aussi le caractĂšre de l'activitĂ© interne la plus haute. C'est le son articulĂ©, le mot, qui seul nous offre l'existence oĂč l'externe et l'interne sont si intimement unis. Par consĂ©quent, vouloir penser sans les mots, c'est une tentative insensĂ©e [...] Et il est Ă©galement absurde de considĂ©rer comme un dĂ©savantage et comme un dĂ©faut de la pensĂ©e cette nĂ©cessitĂ© qui lie celle-ci au mot. On croit ordinairement, il est vrai, que ce qu'il y a de plus haut, c'est l'ineffable. Mais c'est lĂ  une opinion superficielle et sans fondement ; car, en rĂ©alitĂ©, l'ineffable, c'est la pensĂ©e obscure, la pensĂ©e Ă  l'Ă©tat de fermentation, et qui ne devient claire que lorsqu'elle trouve le mot. Ainsi le mot donne Ă  la pensĂ©e son existence la plus haute et la plus vraie. »
Hegel, Encyclopédie des sciences philosophiques. Philosophie
de l'esprit, trad. A. Vera, Félix Alcan, add. § 462,
(tous droits réservés).
Ce texte se déploie selon trois moments : dans un premier temps (jusqu'à « la plus haute ») Hegel montre que le langage donne l'élément d'universalité en donnant une forme objective à ce qui n'était qu'une matiÚre subjective, une extériorité à ce qui n'était qu'intériorité. Le langage est donc mieux qu'un instrument, il est une condition (« nous n'avons conscience... que lorsque... »), et il est un lieu (« c'est dans les mots... ») : nous_pensons_en mots , La précision qui clÎt ce premier temps donne au texte tout son enjeu : si l'« activité interne la plus haute » n'est pas perdue, c'est que nous ne devons pas craindre le langage comme quelque chose qui ferait disparaßtre notre singularité, notre intériorité, dont l'adjectif « haut » signifie bien le prix que nous mettons en elle.
C'est pourquoi le second temps du texte, dans lequel le langage s'unit littĂ©ralement Ă  la pensĂ©e (jusqu'Ă  « qui lie celle-ci au mot ») revĂȘt une certaine portĂ©e existentielle (« l'existence » qui unit l'interne et l'externe). C'est cette crainte d'une perte de l'intĂ©rioritĂ© qui pourrait nous conduire Ă  refuser le mot. Le langage est d'autant moins redoutable, qu'il donne Ă  nos pensĂ©es une extĂ©rioritĂ© qui ne perd pas en route l'intĂ©rioritĂ© de notre subjectivitĂ© : c'est dans le mot que se rĂ©alise la synthĂšse de l'intĂ©rioritĂ© et de l'extĂ©rioritĂ©, celle de la matiĂšre et de la forme. En lui se rĂ©alise cette « union intime » qui n'est finalement rien d'autre que la consubstantialitĂ© du langage et de la pensĂ©e.
Enfin, le troisiÚme temps est consacré à la critique du soi-disant privilÚge de l'ineffable, s'attaquant par là à une idée trÚs répandue, et anticipant ainsi sur la tonalité des analyses de Bergson (voir à ce sujet la premiÚre partie du cours, 2.). Par la métaphore de la fermentation, Hegel montre que la pensée avant le mot n'est que virtuelle, qu'elle doit devenir ce qu'elle est, et que, comme tout ce qui fermente, elle peut moisir, et ne germera qu'avec le mot qui est bien ainsi la condition du passage des linéaments de la pensée à la pensée proprement dite : ce qui ne sait se formuler ne mérite pas le nom de pensée.
Ce qu’il faut savoir
1 Le langage est bien entendu un instrument de la pensée. Lorsque nous avons du mal à exprimer notre pensée, celle-ci demeure confuse.
nous arrive de penser silencieusement, mais cette méditation est un discours intérieur. Par conséquent, ce fait ne prouve pas du tout que l'on puisse penser sans l'aide du langage, mais tendrait plutÎt à prouver que le langage n'est pas un simple instrument de communication, mais bien ce qui permet de penser.
q Une pensée sans langage serait nécessairement intuitive. On pourrait se demander ce qu'il en est de la pensée animale, puisque les animaux ne disposent pas du langage au sens strict du terme. Toutefois, il faut rester prudent. D'une part, nous ne pouvons nous imaginer à quoi correspondrait cette pensée animale, et l'on sait bien que lorsque pour les besoins de la fiction un auteur veut exprimer la pensée d'un animal il le fait parler. D'autre part, il faut prendre le mot « pensée » dans son sens strict, en le distinguant du souvenir ou de l'affectivité, sans quoi le sujet serait vidé de son sens. Nous conseillerions donc plutÎt de renoncer à évoquer ici les animaux.
q On dit parfois que les mots sont impuissants Ă  transcrire la proÂŹfondeur de ce que l'on Ă©prouve ou de ce que l'on pense. Cette idĂ©e - ou ce prĂ©jugĂ©, peut-ĂȘtre - invite Ă  considĂ©rer qu'une pensĂ©e sans langage ne serait pas une sous-pensĂ©e mais bien au contraire le moyen d'accĂ©der aux mystĂšres les plus profonds.
q Cependant, il est évidemment trop facile de justifier son incapacité à s'expliquer au nom de la profondeur de ce que l'on pense. De plus,

une telle prise de position interdit tout progrÚs de pensée, lequel suppose le dialogue et la confrontation des idées, ainsi que la recherche de l'expression la plus claire possible.
Ce qu'il faut comprendre
Ce sujet invite Ă©videmment Ă  s'interroger sur les rapports entre le langage et la pensĂ©e. Il ne faut donc pas s'arrĂȘter Ă  ce qui est Ă©vident, Ă  savoir que le langage permet d'exprimer la pensĂ©e, ni s'Ă©vertuer Ă  rĂ©soudre de faux problĂšmes, comme celui de savoir si la langue des signes pratiquĂ©e par les sourds relĂšve du langage ou non (la rĂ©ponse est Ă©videmment oui).
CI Cette question des rapports entre le langage et la pensĂ©e fait d'abord apparaĂźtre deux positions radicalement opposĂ©es, qu'il faudra confronter. La premiĂšre fait du langage un obstacle Ă  la pensĂ©e, obligĂ©e de se couler dans un moule de conventions qui l'empĂȘchent d'atteindre la rĂ©alitĂ© profonde des choses. Elle met au plus haut l'ineffable, et aspire Ă  un idĂ©al de pensĂ©e purement contemplative, oĂč l'intelligence entre directement en contact avec son objet sans passer par la mĂ©diation du langage. La seconde fait de la pensĂ©e un simple effet du langage, et renverse ainsi l'opinion commune sur ce sujet. Celle-ci en effet croit que nous pensons d'abord, avant de chercher les mots pour tĂ©moigner de cette pensĂ©e Ă  autrui. Or, nous l'avons vu, cette « premiĂšre pensĂ©e » ou cette mĂ©ditation est dĂ©jĂ  en rĂ©alitĂ© un discours intĂ©rieur. A partir de lĂ , on pourrait supposer que nos pensĂ©es sont dĂ©terminĂ©es par la structure du langage, et qu'il suffirait de doter une machine d'un langage suffisant pour crĂ©er de l'intelligence artificielle. Bien entendu, on peut essayer d'Ă©chapper Ă  cette alternative. Il serait d'ailleurs trĂšs dommageable pour la philosophie qu'on ne puisse choisir qu'entre .l'irrationalisme et l'idĂ©e selon laquelle la pensĂ©e ne serait que le produit d'un conditionnement _ linguistique.
Une référence utile
Hegel, dans son souci de dĂ©fendre la possibilitĂ© pour la raison d'atteindre le vrai, critique l'idĂ©e d'ineffable. Nos pensĂ©es ne sont vĂ©ritables que si elles prennent une forme objective, ce que seul permet le langage. Ajoutons que cette expression de la pensĂ©e est condition de toute rĂ©flexion, c'est-Ă -dire de tout retour sur soi-mĂȘme qui permette de

repenser une idĂ©e. L'ineffable, loin d'ĂȘtre la pensĂ©e la plus profonde, n'est que la pensĂ©e obscure « Ă  l'Ă©tat de fermentation ». Ce n'est, pourÂŹrait-on dire, qu'une pensĂ©e en puissance, qui attend les mots pour se rĂ©aliser vĂ©ritablement. Ceci ne signifie pas que les mots pensent Ă  notre place, bien au contraire. Mais l'effort pour penser le rĂ©el est d'abord un effort pour trouver l'expression qui rende cette pensĂ©e intelligible : il n'y a pas deux efforts distincts, l'un pour comprendre et l'autre pour dire, mais un unique effort pour saisir l'essence Ă  travers le mot qui l'exprime.

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Citations sur Le langage peut il ĂȘtre une prison? :

puce Le temps est notre prison. Il peut aussi ĂȘtre notre piste de dĂ©collage. - Jean Dion
puce C’est dans et par le langage que l’homme se constitue comme sujet; parce que le langage seul fonde en rĂ©alitĂ©, dans sa rĂ©alitĂ© qui est celle de l’ĂȘtre, le concept d’ "ego"
 Est "ego" qui dit "ego". - Benveniste
puce Le propre du langage est d’ĂȘtre un systĂšme de signes sans rapport matĂ©riel avec ce qu’ils ont pour mission de signifier. Si l’art Ă©tait une imitation complĂšte de l’objet, il n’aurait plus ce caractĂšre de signes. Si bien que nous pouvons concevoir l’art comme un systĂšme significatif... Mais qui reste toujours Ă  mi-chemin entre le langage et l’objet. - LĂ©vi-Strauss
puce Le langage est la maison de l’ĂȘtre. - Heidegger
puce Un langage de programmation est censĂ© ĂȘtre une façon conventionnelle de donner des ordres Ă  un ordinateur (...). Il n'est pas censĂ© ĂȘtre obscur, bizarre et plein de piĂšges subtils (ça, ce sont des attributs de la magie). - Dave Small